jeudi 5 mai 2011

SORTIE // LE M-IN-I PALAIS, TOUT SIMPLEMENT

De la minijupe à la Mini Cooper en passant par le Mac Mini, ce préfixe va finir par perdre de sa crédibilité... Et voilà que ça continue avec le Mini Palais, restaurant qui n'a de mini, on vous l'assure, que le nom.

D'abord le Mini Palais c'est un lieu. Un grand lieu, puisqu'il est situé au coeur même du Grand Palais (non, pas du Petit Palais, on a bien dit du Grand). Et qui dit Grand Palais dit naturellement grandiose. C'est donc aussi une ambiance, une atmosphère unique et magique. Ensuite ce sont deux chefs, Stéphane d'Aboville sous la direction d'Eric Fréchon (lequel est couronné de trois étoiles au Michelin tout de même). Et puis, comme il faut s'y attendre, tout ceci a un prix... un prix, vous l'aurez compris, pas si mini, mais on y reviendra.

Laissez-moi vous conter une histoire. Un soir d'été, vous vous décidez à vous offrir un dîner fin, dans un cadre somptueux quitte à recevoir un appel de votre banquier le lendemain, mais qu'importe, et vous vous souvenez soudain avoir lu qu'en septembre dernier, le restaurant du Grand Palais a rouvert ses portes. Vous arrivez donc, habillé sobrement mais élégamment, très casual, et tentant de dissimuler aux serveuses vos yeux brillants tout en étouffant un "Whouah" dont vous jugez qu'il serait vraiment par trop pathétiquement infantile, vous vous installez à une table de la terrasse qui surplombe l'avenue Winston Churchill et fait face au Petit Palais. Entre chien et loup, on vous propose à grand renfort de sourires un apéritif que vous refusez par égard pour votre portefeuille, ou votre foie, ou les deux, et tandis qu'on vous apporte une petite gougère au fromage, vous portez votre regard sur la carte alléchante. Et là ce sont à vos papilles de crépiter, de trépigner d'impatience. Très raisonnablement tenté par la galantine de volaille fermière truffée et foie gras de canard, vous optez finalement pour un saumon mi-fumé et mi-cuit et sa mousseline d'oeuf à la truffe noire, que vous arrosez généreusement d'un pouilly fumé. Ebloui par cette première explosion de saveurs, vous passez au plat et vous réjouissez à l'avance d'avoir choisi le suprême de volaille rôti aux morilles et asperges blanches, tout en ayant lourdement insisté auprès de vos amis pour qu'ils commandent autre chose (histoire de goûter un peu de tout quand même), par exemple, tout à fait au hasard le cabillaud nacré et son écrasé de pomme de terre au jus de cresson.











Passablement éméché après votre deuxième bouteille (vous êtes passé au rouge, mais attention, on ne parle pas ici du gros rouge qui tâche les lèvres et les dents, vous donnant peu de vraisemblance lorsque vous nierez effrontément devant vos parents, avoir bu du vin, quelques heures plus tard), vous vous laissez une pause pour discuter dans ce cadre enchanteur, divin, sous les palmiers et les colonnes monumentales, vous sentant de façon définitive privilégié. Evitant au final le fromage dont vous vous dîtes qu'il ne peut pas vous surprendre plus que le Caprice des Dieux que vous trouvez au Monoprix (vous vous direz plus tard que c'était là une sordide erreur), vous passez au dessert, et somme toute assez repu, vous vous décidez pour une simple salade de pommes vertes et de framboises aux herbes fraîches. Et là, oui, précisément là, l'émerveillement vous envahit. Soudainement inspiré, vous pourriez être tenté devant cette dernière apothéose de vous lancer dans un monologue similaire à celui de Marshall Eriksen décrivant son burger dans How I Met Your Mother, mais vous évitez néanmoins pour vous concentrer uniquement sur les arômes exceptionnels de thé, de laurier, de sucre et de thym qui parfument avec génie ces humbles pommes Granny et ces quelques framboises... Arrive enfin le moment délicat de la note, où vous savez avoir dépassé les bornes, mais songeant que faire la vaisselle serait une humiliation indescriptible après un repas si élitiste, et considérant avec raison qu'on ne fait pas un basket au Mini-Palais, vous vous contentez de serrer les dents en affichant un sourire que vous voulez désinvolte, mais qui sonne irrémédiablement faux.

Ne dites pas le contraire, vous vous y voyez très bien !

Mais parlons peu, parlons bien. L'entrée lambda et les desserts sont de l'ordre de la dizaine d'euros et les plats valent grosso modo le double. Là où il vaut mieux se restreindre, c'est la carte des vins, dont les prix ne sont bien sûr pas les mêmes que ceux des piquettes qui constituent d'année en année les apéritifs de la jeunesse française, j'ai nommé Vieux Papes, Listel et autre Cabernet d'Anjou... En clair, ce ne sont pas les prix du Café de l'Industrie, mais ce n'est pas non plus dramatiquement scandaleux compte tenu de l'inventivité de la cuisine, du cadre et du service. Et puis il reste la solution d'y aller avec vos parents, histoire de rester insouciant quant à la note !

Mini-Palais
3, avenue Winston Churchill - Paris 8e
01.42.56.42.42
Tous les jours de midi à minuit.


Solal de La Grandville